Collection

" NUAGE ROUGE "
www.nuagerouge.com

Fondée en 1991 par Olivier Delavault

N. SCOTT MOMADAY

 LES NOMS
Mémoires

The Names, a Memoires

Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Danièle LARUELLE



Ce livre, qui représente l’acte même de conter, au sens très indien du terme, exprime la quintessence du monde de Momaday tant sur les plans personnel, philosophique et spirituel.

N. Scott Momaday, Indien kiowa, est l’auteur de nombreux livres sur l’indianité moderne qui tient compte de la tradition. Prix Pulitzer en 1969 pour La Maison de l’aube, il enseigne la littérature à l’université de l’Arizona après avoir enseigné en Californie. Il est également un grand peintre reconnu et donne des conférences dans le monde entier. Quatre de ses ouvrages ont déjà été publiés dans la présente collection, La Maison de l’aube, Le Chemin de la Montagne de pluie, L’Enfant des temps oubliés, L’Homme fait de mots.

Initialement, les noms sont ceux d’animaux et d’oiseaux, d’objets ayant une définition pour l’œil, une autre pour la main, de formes et de reliefs sur l’horizon du monde, de sons qui portent sur le vent lumineux et à travers le vide. Ils sont anciens, premiers pour l’esprit, comme le clapot rythmé de la pluie sur la rivière, intrinsèques à la langue indigène, et ils échappent, fuyants, comme ceux qui les portent, qui tournent un moment dans la mémoire, poursuivent leur chemin et s’en vont pour toujours. Pohd-lohk, Keahdinekeah, Aho.

La terre s’installe dans l’été finissant. Dans la lumière blanche, un tourbillon se déplace au loin, sur la plaine, laissant dans son sillage comme une ombre sur l’herbe, un frémissement, plus rien. A midi, immobilité et silence semblent régner, mais c’est une illusion : le paysage se soulève et retombe, il résonne. Dans la végétation dense des terres basses, une onde sombre progresse sur la rivière Washita. Une araignée pénètre dans une étroite flaque de lumière près de Rainy Mountain Creek et, en aval, au confluent, un poisson chat se retourne dans le courant, sinue vers la surface où une libellule guette et s’élance. Au loin, sur les terres hautes, sauterelles et abeilles font retentir les champs de leurs crépitements, de leurs vrombissements ; alouettes et queues en ciseaux sifflent et virevoltent. Quelque part dans le dédale de ravines, un veau frissonne et mugit, pris dans un enchevêtrement de saponaires. Et puis, haut dans le ciel, un faucon pivote contre le soleil et s’éloigne en planant.

Gyet’aigua. Où t’es allé ?

De l’autre côté du ruisseau.

Fait chaud, hein ?

L’angle de la rivière Washita et de Rainy Mountain Creek pointe vers l’est, et le flot rouge, épais, descend au plus profond des Plaines du Sud comme pour mesurer, à l’aulne de quelque équation ancienne et naturelle, le long chemin depuis la ligne de partage des eaux jusqu’au cœur de l’Amérique du Nord. Cet angle est une marque, un espace défini sur la face des Grandes Plaines, une idée de la géométrie dans l’esprit de Dieu.

L’eau s’écoule en plans sur la terre, en cordes dans les entailles des berges ; le vent lance ses assauts ; les éclairs incessants déchirent l’hémisphère froid et noir ; et tout devient visible, étrangement visible. Oh Man-ka-ih !

Extraits du livre.
 


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© Olivier Delavault - Mars 2000.